• Article 6

     

    Texas Instruments TI-30 et TI SR-40

    Naissance d’un mythe

     

    Publication originale le 08/06/2007

     

    Aujourd’hui, pour ce 6ème article, je vais vous parler de la TI-30. Une machine mythique !

     

    Pensez donc : elle a été commercialisée la première fois en Europe en 1977 et ce jusque … maintenant. Et ce n’est pas fini. J’ai lu quelque part qu’on venait de fêter son trentième anniversaire (en 2007). Connaissez-vous une seule autre machine qui ait eu une aussi longue longévité ?

    Pourquoi un tel succès, c’est ce que je vais essayer de vous expliquer, modestement car je ne suis pas un expert.

     

     

                                      

                                       Photo 1 : TI-30 et TI SR-40 : même machine

     

    Dans quelle catégorie vais-je la ranger ?

     

    Cette machine n’est pas programmable, donc elle ne fait pas partie de ma collection principale. Mais en fait, comme dans toute collection j’imagine, on accumule des objets qui sont un peu différents. J’ai déjà expliqué comment je m’en étais sorti en créant des catégories qui englobaient tous les objets de ma collection, pour faire croire qu’il y avait une réflexion puissamment balaise là-derrière ! Cette TI-30 est donc classée dans la catégorie « calculatrice scientifique non programmable ».

    Maintenant que je relis mon article à la poursuite des fautes d’orthographe, je me demande encore comment j’ai pu écrire un texte aussi long à propos d’une machine aussi simple !

    Non, ce n’est pas en recopiant le mode d’emploi ! Bien essayé !

     

    Historique

     

    Tout d’abord revenons au début. Les calculateurs électroniques (contrairement aux calculatrices qui peuvent être mises en poche) ont commencé à exister dans les années 40, plutôt sous forme de prototypes destinés aux militaires, comme d’habitude ! Ces machines étaient énormes et remplissaient allègrement une pièce toute entière.

    De grands progrès ont été réalisés dans les années 60 pour miniaturiser les circuits et aussi avec l’invention du circuit imprimé. Et ce sous l’impulsion des programmes Apollo de la NASA.

     

    3 étapes à retenir :

    §       La première calculatrice électronique date de 1967 et était un prototype TI, commercialisé en 1970 par Canon : la Canon Pocketronic. Elle n’avait que les 4 opérations de base.

     

    §       La première calculatrice scientifique est apparue en 1972, 2 ans plus tard seulement. La HP-35 était née. Elle coûtait 1 demi salaire de l’époque (2520 FF en 1972, soit 2137 € actualisés).

     

    §       La première calculatrice scientifique programmable est née en 1974 avec la HP-65.

     

    Avant cela tous les calculs se faisaient à la règle à calcul ou avec les tables de logarithme qui feront l’objet d’autres articles.

     

    Ces premières machines coûtaient une véritable fortune. Pour la HP-65, j’ai lu qu’elle coûtait l’équivalent d’une petite voiture, et à cette époque les voitures étaient vraiment très chères !

     

    Nous voyons donc que Texas Instruments avait inventé un modèle précurseur des calculatrices simples, rapidement rattrapé et dépassé par Hewlett-Packard qui a successivement inventé la 1ère calculatrice scientifique puis la 1ère calculatrice scientifique programmable.

    Et pourtant Texas Instruments a gagné la guerre de la calculatrice scientifique, si j’ose dire.

    Comment ? Par une politique de prix agressive, une continuité dans la production des gammes de machines et une diversification des gammes, à tel point qu’aujourd’hui, 30 ans plus tard, la TI-30 demeure le modèle incontesté de LA calculatrice scientifique.

    Les raisons d’un tel succès sont donc d’une part qu’elle dispose de toutes les fonctions de base d’une calculatrice scientifique, toujours d’actualité, et d’autre part, qu’elle utilise la notation algébrique avec parenthèses, plus facile que la notation polonaise inverse de HP.

     

    Que reste-t-il des dizaines, ou peut-être des centaines de marques qui existaient au début de l’électronique grand public ? Seules 4 marques principales : Hewlett-Packard, Casio, Sharp et Texas Instruments. Encore que Sharp ne produit quasiment plus de calculatrices scientifiques, et encore moins programmables.

     

     

    Les différences entre la TI-30 et la TI SR-40

     

    Les premières TI s’appelaient SR. J’ai en ma possession une TI SR-40 et je ne voyais pas de différence avec la TI-30, apparue en même temps. En fait, en y regardant de plus près, on voit quelques différences au niveau de la finition : sur la TI SR-40 le fond du clavier est noir, les symboles des touches sont gravés sur celles-ci, ce qui lui donne un aspect propre et soigné comme sur le haut de gamme avec la TI-59. Sur la TI-30, le fond du clavier est doré, et les symboles des touches sont imprimés sur ce fond, et non plus gravés. Gain de travail et de prix, puisque toutes les touches sont identiques de couleur noire.

     

       

    Photo 2 : TI-30, TI SR-40 et TI-59

     

    Le prix de vente de la TI SR-40 était de 50 US$ alors que la TI-30 était de seulement 25 US$ (150 FF de 1976, soit 84 € actualisés). Les 2 machines sont apparues en même temps, en juin 1976. La TI SR-40 était définie comme « la version luxueuse de la TI-30 ».

     

    En résumé, comment vendre la même machine à moitié prix, sans encourir le mécontentement des acheteurs de l’autre modèle ? En changeant le nom de la machine, son look et son prix !

    La TI SR-40 est de meilleure fabrication, et, est-ce un hasard, mais mes 2 TI-30 ont un problème avec les touches alors que la TI SR-40 fonctionne parfaitement bien ?

     

    La TI-30 a évolué en une cinquantaine de versions successives, mais les fonctions sont restées les mêmes. Elle est la machine la plus vendue dans le monde. On estime à 15 millions le nombre de machines vendues entre 1976 et 1983  pour le premier modèle ! Et que dire alors maintenant, en 2007 ?

     

     

    Aspect extérieur, ergonomie

     

    La TI-30 a le look des anciennes calculatrices des années 70 : forme biseautée avec l’écran plus haut que l’avant du clavier, notamment pour y placer l’écran électroluminescent de manière penchée (il faut être bien en face pour voir les chiffres, qui sont en fait tous agrandis à l’aide d’une petite loupe devant chacun de ceux-ci) et aussi pour y placer à l’intérieur une pile de 9Volts carrée ou une batterie rechargeable.

     

     

    Photo 3 : écran de la TI-30 avec ses loupes devant chaque chiffre

     

    L’écran est constitué de diodes rouges très visibles, mais également très gourmandes en courant électrique.

     

    Les touches sont en plastic dur et sont réputées « dures » à la pression. On entend parfaitement le clic de chacune d’elles. En classe, quand vous aviez 20 étudiants pianotant en même temps, cela faisait un certain bruit.

    J’ai déjà mentionné le problème de ces touches.

    Quand on appuie sur une touche de la TI-30, elle prend 2 fois en compte cette touche. Par exemple, si je tape le chiffre « 8 », il va s’inscrire « 88 ». Si je me rappelle bien, c’est un problème très connu avec les TI.

    Comment voulez-vous travailler avec cela ?

    Bon, il faut relativiser un peu. J’imagine qu’au début, la plupart de ces machines fonctionnaient correctement. Mais plus tard ? C’est peut-être une raison pour laquelle les utilisateurs exigeants (ingénieurs, techniciens) préféraient les HP, qui ont misé pendant très longtemps sur une qualité haut dessus de tout, et sans compromis. Cette période est malheureusement finie, la qualité HP actuelle n’ayant plus rien à voir avec celle d’avant.

     

    Autonomie

     

    L’autonomie, voilà bien le gros problème de ces premières machines. Les écrans électroluminescents consommaient beaucoup de courant, ce qui limitait leur autonomie d’autant. La TI-30 fonctionnait avec une pile carrée de 9 volts, ce qui lui autorisait 20 heures d’autonomie. Il existait sous forme d’accessoires un adaptateur secteur et une batterie rechargeable qui donnait une autonomie de 2 heures de calculs, pour 4 heures de charge.

    Face à ce problème, Texas Instruments a développé une fonction d’économie d’énergie : l’affichage se met « en veille » après 25 à 50 secondes d’inactivité. Un point double balaye alors l’écran pour indiquer ce mode « économique ».

     

     

    Photo 4 : écran de veille de la TI-30

      

    Pour revenir à l’affichage précédent, il faut appuyer sur une touche quelconque, selon la notice. L’ennui, c’est que toutes les touches font une action sur le résultat. La solution consiste donc à appuyer 2 fois sur la touche « EXC », qui échange le contenu de la mémoire avec l’affichage d’un calcul, de ce fait, rien n’a changé. Astuce typiquement de l’époque.

    Au bout de 7 à 15 minutes d’inactivité en mode veille, la machine s’éteint définitivement. Et on perd son résultat, car il n’y avait pas encore de mémoire permanente.

     

    Fonctions

     

    Il est à remarquer que Texas Instruments a eu recours à plusieurs reprises à des astuces pour pallier certaines fonctions qui font défaut sur cette machine, et que l’on trouve couramment sur des modèles apparus plus tard sur le marché. A cette époque, il fallait encore réfléchir pour tirer tout le parti de sa précieuse calculatrice. Ceux qui sont de la génération avant moi ont connu la règle à calcul et la table de logarithme, et je pense qu’ils ont dû apprécier encore beaucoup plus que les gens de ma génération l’arrivée des calculatrices scientifiques.

     

    Il existe un indicateur d’erreur en toute lettre « error » en cas de dépassement de capacité de calcul, soit pour des nombres > 10100.

     

    La calculatrice fonctionne en respectant les règles algébriques suivantes : la multiplication et la division ont priorité sur l’addition et la soustraction. De plus, on peut utiliser les parenthèses (à 15 niveaux !) pour définir les priorités de calculs.

    Si je mentionne ce qui parait évident, c’est que sur les HP fonctionnant en notation polonaise inverse, il n’y a pas de parenthèses, et donc il faut se triturer l’esprit pour faire les calculs depuis le niveau le plus imbriqué, en calculant chaque fois des résultats intermédiaires que l’on additionne à la « pile » des anciens résultats, et ainsi de suite. C’est comme si vous travailliez avec 2 mémoires uniquement !

    Ceux qui connaissent m’ont compris.

    Les fonctions mathématiques utilisent des méthodes itératives avec une précision assurée sur le 8ème chiffre significatif.

     

    Pour décrire les fonctions scientifiques, je les regrouperais en 4 domaines :

     

    -          fonctions de puissances

    -          fonctions logarithmiques

    -          fonctions angulaires et trigonométriques

    -          fonctions de mémoires

      

      

          1. Fonctions de puissances

      

    Je n’ai pas besoin de développer ces fonctions, qui sont les plus courantes.

    1/x, x², Öx, yx 

     

    J’ai placé ici la fonction 1/x car c’est en fait x-1, et Öx car c’est aussi x1/2.

    Pour obtenir par exemple la racine carrée de 64, il suffit de taper 64 puis d’appuyer sur la touche Öx.

    Pour obtenir la racine nième : INV yx

      

    2. Fonctions logarithmiques

      

    LOG est le logarithme de base 10 et LN celui de base e=2,71.

    Il n’y a pas de touche qui donne directement l’exponentielle de base 10 et celui de base e=2,71. Pour obtenir l’exponentielle on doit recourir à l’astuce suivante : par INV LOG, et INV LN, tout naturellement.

                3. Fonctions angulaires et trigonométriques

    Le mode angulaire par défaut est en degrés. Pour passer en radians, appuyer une fois sur la touche DRG. L’affichage indique une apostrophe à gauche.

    En appuyant une deuxième fois sur DRG, on passe en grades et l’affichage indique 2 apostrophes à gauche.

    Nous avons les touches SIN, COS, TAN pour les fonctions trigonométriques, et INV SIN, INV COS et INV TAN pour leur inverse.

     

    Pour les conversions DEGRE-GRADE-RADIAN il a été développé une autre astuce. Par exemple pour convertir 45° en grades, il faut se mettre en mode DEGRE, entrer le chiffre 45, appuyer sur la touche SIN, passer en mode GRADE en appuyant 2 fois sur la touche DRG, puis faire INV SIN. Réponse : 50.

     

      

     

      

     

     

    Photos 5 à 8 : conversion d’angle sur la TI-30

     

    C’est relativement facile, mais beaucoup moins que sur ma calculatrice Migros M-OFFICE ESR-110 de mes études. De plus il y a un risque d’erreur car plusieurs angles peuvent avoir le même sinus, et lors d’une conversion la machine n’indique que le plus petit de ces angles. Là aussi il faut bien réfléchir !

    La touche p donne bien sûr la valeur 3,1415927.

     

               4. Fonctions de mémoires

      

    Il y a 4 touches affectées aux manipulations de la mémoire.

    STO : pour entrer un nombre en mémoire

    RCL : pour rappeler un nombre placé en mémoire

    SUM : pour additionner le nombre affiché à celui qui est en mémoire

    EXC : pour échanger le contenu de la mémoire avec le nombre affiché.

     

    Ces mémoires sont apparues quelques années auparavant et se révèlent bien pratiques. C’était une petite révolution. Cela servait principalement à mettre des résultats intermédiaires de côté « en mémoire » et assurer les résultats.

     

    La touche K permet des calculs avec constante sur les opérateurs +, -, *, :, yx, et INV yx, ce qui n’est pas mal du tout.

     

    Les pourcentages % fonctionnent sur les 4 modes +, -, *, :

     

     

    Conclusion

     

    Voici donc finie la description de ce modèle historique. La TI-30 mérite bien que je lui consacre un article. Les jeunes de maintenant ne se rendent pas compte de la chance qu’ils ont d’avoir pour quelques euros des calculatrices performantes qui sont les descendantes directes de cette TI. Leurs parents qui ont connu cette époque des années 70 et 80 savent toute la valeur de ces machines. C’était une époque pleine  de nouveautés technologiques et pleine d’espoir aussi.

     

    « C’était le bon temps, mon bon monsieur ! »

     

     

     


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